Le coup de coeur du mois : "Perspective(s)" de Laurent Binet
Murielle Navarro nous livre son dernier coup de cœur : le dernier ouvrage de Laurent Binet, "Perspective(s)".
J'avais adoré "la septième fonction du langage", lorsqu'un brillant doctorant en sémiologie dirigeait l'enquête sur la mort (suspecte) de Roland Barthes, en compagnie d'un commissaire de police parisien.
Avec "Perspective(s)", Laurent Binet renouvelle le genre mais au 16ième siècle, en relatant les investigations menées à Florence, sur le supposé assassinat de PONTORMO, un peintre maniériste de la Renaissance.
Celui-ci a été découvert inanimé devant son immense fresque inachevée, en l’église de San Lorenzo. Georgio Vasari (considéré comme le premier historien de l'art) est chargé de l'enquête, et il demande de l'aide auprès de son vieil ami Michel Ange. Outre la mort étrange de cet artiste, on constate avec stupeur que l'un de ses tableaux, une œuvre polémique et scandaleuse, a disparu...
Avec délice, nous savourons alors l'écriture désuète et les propos alertes parfois crus de ce polar épistolaire ; le style mordant et les expressions teintées d’humour noir de l’auteur, nous invitent à découvrir ainsi des interlocuteurs hauts en couleurs....
Mais qui a tué Pontormo ? Bronzino son ancien élève et ami, ou peut-être l’un de ses assistants maltraités par la victime ? Ou encore deux religieuses fanatiques ? Pourquoi pas un ouvrier en colère (avec la révolte prolétarienne des Ciompi), ou même un membre de la famille des Médicis, ou encore … ?
"Tout le monde est suspect".
Dans sa préface, Laurent Binet présente d’ailleurs tous les protagonistes du roman, afin de mieux nous aider, dans une lecture plus fluide de l’énigme. Cette fiction originale sous forme de missives échangées, rappelle bien évidemment les captivantes « liaisons dangereuses » de Choderlos de Laclos, en suivant notamment, les correspondances de l’ingénue Maria de Médicis, adressées à sa tante, reine de France. Mais d’autres personnages connus ou moins connus de l’époque, interviennent également de manière épistolaire dans ce récit. Le choix littéraire de brouiller les pistes par des lettres au contenu parfois contradictoire, permet d’aiguiser la réflexion du lecteur au cœur même de l’intrigue.
1- Laurent Binet, La septième fonction du langage, éditions Grasset , Paris, 496 p, prix Interallié 2015
2- Laurent Binet, Perspective (s), éditions Grasset, Paris, 304 p
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