Les temps d'art
D’une rive à l’autre ... .
En cette fin d’année, le Centre d’Art Contemporain d’Eysines nous présente une nouvelle exposition baptisée pour l’occasion « les deux rives, Christian Gardair et Mohamed Aksouh ». Les paysages imaginaires des deux artistes nous invitent à voyager dans deux univers parallèles, qui se répondent par les frémissements et le trouble de leurs couleurs.
Christian Gardair « se dépeint » comme un inlassable « Paysageur. » ; il déambule au détour d’un
chemin linéaire, ponctué par de petites touches répétées de couleur : Le maillage de ses toiles où se
confondent eaux et lumière, engendre chez le spectateur une onde vibratoire harmonieuse. L’univers poétique de l’artiste rayonne dans ses peintures comme Ut pictura poesis « comme la peinture, la poésie »1 . Dans un miroitement irradiant, les saisons viennent mesurer délicatement le cycle du temps par leurs nuances parfois nuageuses. L’artiste aquitain est amoureux de l’estuaire de la Gironde et il laisse transparaitre son inclination pour ce port d’attache, en observant de son pinceau vif, le mouvement de l’eau au gré des saisons. Sa peinture privilégie une musique imaginaire où chacun peut entrer en résonance par de multiples variations colorées dans ses compositions sérielles. Les teintes énigmatiques de l’artiste « se pointillent » essentiellement sur le bleu céleste et sur le bleu mouvant de l’eau dans son clapotis silencieux. Le spectateur peut voyager au milieu des lignes croisées, et sillonner la toile, sur des tensions de lumière, bercé par le roulis des vaguelettes, et l’ondulation des couleurs reproduites à l’infini. Une gamme de pulsations émotionnelles propose le tempo d’une chorégraphie aux rythmes sensibles, et tresse des partitions musicales tout en caressant du doigt des rêves inattendus entre douce transparence et souffle chaud. On se laisse emporter en mer inconnue par ses reflets envoutants et on s’égare dans un autre monde avec enchantement. Les œuvres de l’artiste se ressemblent, tout en restant sans cesse dissemblables ; les touches de couleur se fondent les unes aux autres, se chevauchent comme un palimpseste qui conserve en mémoire les traces secrètes d’un passé invisible, dans un monde souterrain incertain.
Sur l’autre rive de l’exposition, Mohamed aksouh « surfe » sur la vague nostalgique de son pays natal l’Algérie. Sa peinture abstraite laisse apparaitre quelques formes que chacun peut interpréter à sa manière selon son vécu et sa propre sensibilité. L’artiste nuance sa palette de couleurs plus pâteuses et ses aplats se confondent dans la pénombre de brun et de vert kaki. Ses formes épurées engendrent un climat irréel révélé par quelques éclats de lumière. L’artiste appelle le spectateur à entrer dans ses oeuvres, et à pénétrer dans son univers souterrain où les empreintes de peinture plus irrégulières viennent déborder de la toile. Le peintre méditerranéen nous fait voyager dans le Hoggar et ses paysages recréent le chaos de ses blocs de rochers parcourus par des cris éblouissants. L’artiste nous fait découvrir au détour d’une toile, une œuvre non titrée qui symbolise le cimetière familial, peuplé de stèles cubiques, de silhouettes tracées et de crânes esquissés ; sa palette se teinte alors de coloris plus sombres, de teintes plus austères. Ses paysages plus âpres nous convient ainsi à pénétrer dans les bouleversements architecturaux du peintre.
Chacun des deux artistes exposés au château Lescombes vous invite à voyager dans son univers
pictural, à partager ses émotions et son imaginaire. Vous pouvez venir découvrir leurs œuvres
étonnantes et singulières jusqu’au 9 décembre 2018.
texte : Murielle Navarro
LES DEUX RIVES : CHRISTIAN GARDAIR ET MOHAMED AKSOUH · Château Lescombes.
Exposition. Du Jeudi 04/10/2018 au Dimanche 09/12/2018.
1.Citation extraite d'un vers de l’art poétique d’Horace. Thème de la critique littéraire et artistique sur la correspondance des arts
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